L’Évangile de Saint Jean sur le Bon Pasteur comporte en fait deux paraboles, celle du berger (notre évangile d’aujourd’hui) puis celle de la porte. Saint Jean précise que ces deux paraboles sont adressées aux pharisiens : Jésus leur a raconté la première, mais ils ne comprirent pas ce qu’il voulait leur dire. Alors il enchaîne sur la deuxième. Ce récit vient tout de suite après celui de la guérison de l’aveugle-né. Nous nous rappelons que l’attitude de Jésus à l’égard de cet homme a contrasté avec celle des pharisiens. Ils ont chassé cet homme. Jésus, au contraire l’a accueilli, guéri et converti. À cette occasion, il leur reproche leur propre aveuglement. « Si vous étiez des aveugles, vous n’auriez pas de péché ; mais à présent, vous dites ‘nous voyons’ : votre péché demeure. »
Ce péché que Jésus reproche aux pharisiens, c’est de s’enfoncer dans leur certitude. C’est cela qui les aveugle. Ils étaient sans doute des juifs très pieux qui avaient un sens particulièrement vif de la grandeur de Dieu. Mais ils en oubliaient que Dieu est aussi celui qui se fait le Tout-Proche. Cette révélation apparaît déjà à plusieurs reprises dans l’Ancien Testament. Mais les pharisiens avaient tellement le sens du sacré qu’il leur était impossible de prêcher la proximité de Dieu.
Les pharisiens comprennent très bien que le Pasteur, c’est Dieu et que c’est de la relation à Dieu qu’il s’agit ; mais c’est cette relation de proximité qui justement leur paraît inacceptable ; elle semble nier ce qu’on appelle la sainteté de Dieu, l’abîme qui nous sépare de lui. Alors Jésus continue : « vous avez raison de dire que Dieu est le Saint, l’inaccessible et que l’homme ne l’atteint pas par ses propres forces. Mais lui-même nous ouvre la porte pour le rencontrer ; cette porte, c’est moi. “Je suis la porte des brebis. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé.”
Jésus c’est aussi le bon berger qui aime ses brebis. Il n’a rien à voir avec le bandit ou le voleur qui ne s’occupe que de ses intérêts et non des brebis. Comment ne pas penser à tous ceux et celles qui sont dehors parce qu’ils n’ont pas de berger, tous les exclus de toutes sortes.
Jésus est comme le berger, il connaît chacune de ses brebis par son nom ; il les invite à le suivre, non pas pour imposer son autorité mais plutôt pour leur indiquer la route de la paix, de la joie et du bonheur. Là aussi, nous devons nous poser la question : Jésus est-il vraiment celui qui illumine nos vies, qui leur donne une direction ? Y a-t-il chez nous, en bonne place, un livre de la Parole de Dieu, un Nouveau Testament ? Est-ce que nous prenons les moyens de découvrir les enseignements de Jésus, pour nous y conformer, pour vivre selon l’évangile à la manière de Jésus ?
Jésus, le bon Berger, veut nous associer à sa mission. Il a envoyé ses apôtres. Il continue à appeler aujourd’hui. Comme autrefois, il constate que la moisson est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux. Devant l’ampleur de la tâche à réaliser, il ne leur demande pas d’en faire un peu plus ; il leur dit : « priez le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson. » Car une vocation ne s’éveille et ne prend forme que dans la prière. C’est pour cette raison qu’en 1964, le pape Paul VI a établi cette journée mondiale de prière pour les vocations. Mais la prière ne suffit pas ; il nous faut aussi entendre l’appel de Jésus et y répondre. C’est un appel à marcher avec Jésus et à sa suite en le préférant à toutes les richesses de la terre. Cela suppose de notre part une disponibilité de tous les jours.
En lisant cet évangile qui nous parle de la porte et du bon berger, comment ne pas penser à tous ceux qui choisissent des chemins de perdition ? Tous les jours, on nous parle de violences, d’actes racistes, de prises d’otage, de guerres. Des jeunes cherchent à s’évader en consommant de la drogue et au bout du compte, c’est l’enfer… C’est dans ce monde tel qu’il est que nous avons à témoigner du Christ “Berger de toute humanité”. Rien ne pourra jamais l’empêcher de vouloir sauver tous les hommes.
Dans son épître, l’apôtre Pierre nous invite à nous convertir. Se convertir, ce n’est pas d’abord extirper ce qui est mal, même si cela est nécessaire. Nous convertir, c’est nous détourner de notre vie égarée, c’est nous tourner vers le Seigneur ; c’est un peu comme le tournesol qui se tourne vers le soleil pour en cueillir toute la lumière et grandir. Se tourner vers le Seigneur, cela pourrait vouloir dire méditer la parole de Dieu, lire l’évangile. Il s’agit de nous imprégner non seulement de la parole de Dieu mais de Jésus lui-même.
Si nous allons communier au Corps et au Sang du Christ c’est pour entrer dans ce projet d’amour qui anime Jésus. Qu’il nous donne force et courage pour rester fidèles jusqu’au bout aux responsabilités qu’il nous confie. Amen.