Quand Adam reçut la vie des mains de Dieu, il détenait une nature humaine très élevée en perfections de toutes sortes et par-dessus tout surélevée par la grâce sanctifiante. Nous avons vu qu’il l’a fait déchoir en la séparant de Dieu, il l’a découronnée, blessée, non seulement pour lui mais pour tous ses enfants. Désormais et pour toujours c’est une nature, dans ce nouvel état de déchéance, qui sera transmise par la génération. Ainsi le péché commis par l’unique père du genre humain, le péché d’Adam, passe inéluctablement en chacun de ses enfants. Ainsi nous a-t-il détournés de Dieu dans notre nature même qui n’est plus en état de l’aimer comme il convient.
Et devant cette situation irrémédiable en elle-même et par elle-même vont se dresser la miséricorde et l’indulgence de Dieu. Il parle à Adam et à Eve promettant cette postérité victorieuse qui écraserait la tête de Satan. Et le doux temps arrive de nouveau pour nous où nous revivons cette merveille. Nous l’avons chanté « Cieux répandez d’en haut votre rosée et que les nuées fassent pleuvoir le JUSTE. Que la terre s’ouvre et qu’elle germe le SAUVEUR. »
« Qu’il soit anathème celui qui soutient qu’un tel péché puisse être enlevé par les forces de la nature humaine ou par un autre remède que par le mérite de l’unique médiateur, Notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a réconciliés à Dieu dans son sang, ayant été fait pour nous justice, sanctification et rédemption. » (Concile de Trente)
« Réjouis-toi, Adam, notre Père ! » C’est par ces paroles, par cette injonction de St Bernard que nous introduirons notre Noël, cette année ! Oui car il a plu à Dieu de prendre occasion du péché d’Adam pour nous donner son propre Fils et avec lui toutes les autres grandeurs inséparables de l’Incarnation rédemptrice.
Sans doute, notre sensibilité se révoltera-t-elle toujours devant la souffrance, les souffrances qui dérivent pour nous de la faute originelle. Sans doute jusqu’à un certain point le mal restera-t-il une énigme même pour les croyants. Sans doute regretterons-nous la perte de la justice originelle et de ses avantages incontestables. Mais cela, définitivement, est vain. Ce qui est vrai et ce à quoi il nous faut nous rallier c’est au chant de l’Exultet de la Nuit Pascale qui proclame « ô péché d’Adam certainement nécessaire, ô heureuse faute qui a mérité d’avoir un tel et si grand Rédempteur ! »
« La seule aspiration qui convienne est de tendre vers Dieu de tout notre amour, dans notre état de chute et de rédemption ; car notre nature est coupable en Adam et justifiée en Jésus-Christ ; terriblement déchue et plus admirablement relevée ; gâtée au jardin d’Eden et réparée au jardin des Oliviers et sur la colline du Calvaire ; blessée par l’orgueil et guérie par l’obéissance du Fils de Dieu jusqu’à la mort. »
« Réjouis-toi, Adam, notre Père ! » Et nous évoquerons quelques-unes des grandeurs que nous a valu cette faute pourtant détestable mais porteuse de si éclatants témoignages d’amour de la part de Dieu :
-l’histoire de sa sollicitude pour le petit peuple élu qu’on appelle à bon droit l’Histoire Sainte.
-les soupirs et les promesses des saints patriarches et des saints prophètes.
-la femme bénie entre toutes, la seule préservée de la faute pernicieuse, la Toute Pure, l’Immaculée Vierge Marie.
– le mystère inconcevable de la Sainte Incarnation.
-l’Eglise, Mère et éducatrice des Saints.
-l’ardeur des apôtres, la charité des martyrs, la fidélité des vierges, le courage persévérant des chrétiens fervents, les larmes de la pénitence, la dignité et le pouvoir des prêtres.
-le jour bienheureux du second Avènement de notre Sauveur dans sa Gloire où ceux qui auront cru en le Seigneur Jésus et pratiqué sa Loi seront glorifiés en Lui, nouvel Adam, et transfigurés à jamais.
« Réjouis-toi, Adam, notre Père ! » Réjouissez-vous, réjouissons-nous, mes frères ! car il est beau que nous ayons été aimés de cette manière et que dans une semaine, de nouveau, apparaissent à nos yeux éblouis et à nos âmes transportées, la bénignité et l’humanité de notre Dieu Sauveur. « Mon cœur et ma chair défaillent, ô Dieu de mon cœur » dit le psaume. Et St Bernard d’ajouter « Oui, je le déclare bienheureux et saint, celui à qui il a été donné d’éprouver quelque chose de semblable en cette vie mortelle, ne fut-ce que rarement ou même une fois, à la dérobée, l’espace d’un instant. » Que Noël vous apporte cet instant, Amen !