L’on ne peut s’empêcher, en parcourant les différentes parties des messes et de l’office de l’Avent, d’être frappé de ces appels au Messie pressants et répétés : « Venez, Seigneur, ne tardez plus – Le Roi qui va venir, venez, adorons-le – Le Seigneur est proche, venez adorons-le – Venez, Seigneur, pour nous sauver – Mettez en œuvre votre puissance, Seigneur, et venez – O Adonaï, chef de la maison d’Israël, venez pour nous racheter par la puissance de votre bras – O clef de David et sceptre de la maison d’Israël, venez et tirez de sa prison le prisonnier des ténèbres et des ombres de la mort – O Soleil levant, splendeur de la lumière éternelle, venez et illuminez ceux qui gisent dans les ténèbres et l’ombre de la mort – O Roi des Nations et objet de leurs désirs, venez sauvez l’homme que vous avez formé du limon de la terre – O Emmanuel (Dieu avec nous), notre Roi et notre législateur, venez nous sauver, Seigneur notre Dieu. »
Le Messie attendu est donc le Fils de Dieu lui-même, c’est le grand Roi libérateur qui vaincra Satan, qui régnera éternellement sur son peuple et que toutes les Nations serviront. Et c’est précisément parce que la miséricorde divine s’étend non seulement à Israël mais aussi à tous les Gentils (Païens), que nous devons faire nôtre ce « Veni » et dire à Jésus : « O Pierre angulaire qui réunissez en vous les deux peuples, venez ! » Et lorsqu’il sera venu, nous serons tous ensemble guidés par ce divin Pasteur. « Il paîtra son troupeau, dit Isaïe ; de son bras il rassemblera ses agneaux et il les portera dans son sein, lui le Seigneur notre Dieu ».
Cet avènement du Christ annoncé par les Prophètes et auquel aspire le peuple de Dieu est double ; c’est tout à la fois l’avènement de miséricorde où le divin Rédempteur est apparu sur la terre dans l’humble condition de son existence humaine, et l’avènement de justice où il apparaîtra plein de gloire et de majesté à la fin du monde comme Juge et suprême Rémunérateur des hommes. Les Voyants (Prophètes) de l’Ancien Testament n’ont pas séparé ces deux avènements ; aussi la liturgie de l’Avent, qui nous rapporte leurs paroles, parle-t-elle tour à tour de l’un et de l’autre. Notre-Seigneur lui-même, dans l’évangile de ce premier dimanche de l’Avent, par exemple, passe sans transition de son premier avènement au second ; et St Grégoire, dans son homélie sur l’évangile du 3ème dimanche de l’Avent, explique que St Jean-Baptiste, le précurseur du Rédempteur, est en esprit et en vertu, Elie, le Précurseur du Juge.
Ces deux avènements n’ont-ils pas du reste le même but. Car « si le Fils de Dieu s’est abaissé jusqu’à nous en se faisant homme (1er avènement), c’est pour nous faire remonter jusqu’à son Père, en nous introduisant dans son royaume céleste (2ème avènement). Et la sentence que le Fils de l’homme, à qui est remis tout jugement, portera, lorsqu’il viendra une seconde fois en ce monde, dépendra de l’accueil qu’auront fait les hommes à sa première venue ici-bas. « Cet enfant, dit Siméon, est établi pour la ruine et le relèvement d’un grand nombre et comme signe de contradiction. » Le Père et l’Esprit rendent témoignage au Christ, attestant qu’il est le Fils de Dieu, et Jésus lui-même le prouve par ses paroles et par ses miracles ; il appartient aux hommes de faire leur, ce triple témoignage du Dieu en trois personnes et de décider ainsi eux-mêmes de leur sort futur.
Et c’est pourquoi, parallèlement à l’avènement de l’Enfant-Dieu, l’Eglise nous parle, au temps de Noël et de l’Epiphanie, de l’accueil qui lui fut réservé : accueil des humbles bergers juifs, accueil des puissants rois-mages, prémices des nations païennes qui entreront dans l’Eglise à cause de leur foi en Jésus, tandis que les Juifs orgueilleux seront rejetés.
Pendant tout ce Temps de l’Avent, la Sainte Eglise a constamment en vue le double avènement du Sauveur : sa naissance à Bethléem, dont le rayonnement toujours actuel doit s’étendre jusqu’à la fin des temps, et son retour au jugement dernier lorsqu’il viendra « condamner les coupables aux flammes et convier les justes à entrer en son paradis » (Hymne de matines). Toute la messe de ce jour nous parle de ce double avènement, de miséricorde et de justice. Quelques pièces se rapportent indifféremment à l’un et à l’autre (Intr. Or. Grad. All.), d’autres font allusion à la naissance de notre divin Rédempteur qui se fit dans l’humilité (Comm. Postc.), d’autres enfin parlent de sa venue comme Roi dans tout l’éclat de sa puissance et de sa majesté (Ep. Ev.)
L’accueil que nous faisons à Jésus maintenant qu’il vient nous racheter commande celui qu’il nous fera lorsqu’il viendra nous juger. Préparons-nous donc aux fêtes de Noël par de saintes aspirations et par la réforme de notre vie, afin d’être prêts aux assises suprêmes d’où doit dépendre notre sort pour l’éternité. Ayons confiance, car « aucun de ceux qui attendent le Sauveur ne sera confondu » (Intr. Grad. Off.). Amen